05/05/2021

Le 5 mai 1821


Vue de Longwood, offerte par Marchand à Napoléon Ier, le 1er janvier 1820 
par Louis-Joseph-Narcisse 

“De minuit à une heure, toujours le hoquet, mais plus fort. De une heure à trois heures, a bu plus souvent. Il a d’abord souleva sa main, a tourné ensuite la tête pour ne plus boire. A trois heures, hoquet assez fort ; gémissement qui paraissait sortir de loin.

De trois heures à quatre heures et demie, quelques hoquets, pliantes sourdes, après des gémissements, il baille ; a l’apparence de beaucoup souffrir ; a dit quelques mots qu’on n’a pu entendre, et “ qui recule” ; ou certainement “ à la tête de l’armée”.




Lit de Napoléon installé dans le salon, où il mourut.


De quatre heures et demie à cinq heures, grande faiblesse, plaintes. Le docteur le fait un peu élever sur son oreiller. L’Empereur n’ouvre plus les yeux. Il paraît plus faible que la veille. Ce n’est plus qu’un cadavre. Son gilet couvert de crachats rougeâtres qui n’ont pas la force d’aller plus loin. On ouvre les rideaux, les fenêtres du billard.

Toute la nuit, moins des hoquets que des gémissements plus ou moins profonds, quelques fois assez forts pour réveiller ceux qui sommeillent dans la chambre : le général Montholon, le Grand Maréchal, Vignali, Ali. 




Général de Montholon (1783-1853)


De cinq heures du matin à six heures, la respiration a été plus facile, ce qu’on a attribué à la position plus élevée du haut du corps. 






Le  docteur Antommarchi (1780-1838)


A six heures, le docteur (Antommarchi) avec son doigt a frappé le ventre de l’empereur qui a résonné comme un tambour ; il paraissait enflé et déjà sans vie. le docteur a averti que le dernier moment approchait. On a averti le Grand Maréchal et Madame Bertrand.




Général-comte Bertrand ( 1773-1844)

 



Fanny comtesse Bertrand, née Dillon (1785-1836)


De six heures à six heures un quart, hoquets, des gémissements pénibles. De six heures à six heures et demie, grande tranquillité, respiration facile. Dans cette demie-heure, la tête un peu tournée du côté gauche, les yeux ouverts fixés sur le gilet du comte Bertrand, mais du fait de la position, plutôt que par intérêt; l’Empereur ne paraît rien voir, un voile sur les yeux.

A six heures et demie, il a placé sa tête droit, fixant le pied du lit, les yeux ouverts, fixes et voilés. Jusque’à huit heures, un peu de sommeil tranquille, quelques fois des soupirs de quart d’heure en quart d’heure.

A huit heures quelques gémissements, ou plutôt quelques sons sourds, qui paraissaient se former  dans le bas-ventre et siffler en traversant le gosier. ils semblent appartenir plutôt à un instrument qu’être un gémissement. Une larme est sortie de l’œil gauche, du côté de l’oreille. Bertrand l’a essuyée. Arnott s’est étonné que l’Empereur retint la vie si longtemps.

Jusqu’à dix heures et demie onze heures, généralement calme ; respiration douce ; parfaite immobilité de tout le corps ; quelques mouvements seulement dans la prunelle ; mais rares ; les yeux fixes voilés se sont fermés jusqu’aux trois quarts. De demie-heure en demie- heure, quelques soupirs ou sons. Une deuxième larme à la même place ; la main droite sur la couverture du lit ; al main gauche sous la fesse. Depuis six heures du matin, très calme, immobile.

Seize personnes présentes, dont douze Français, Madame Bertrand avec deux femmes, Ali, Noverraz, Napoléon Bertrand, à sept heures ; à sept heures et demie, il s’est trouvé mal.

De onze heures à midi, Arnott a placé deux sinapismes aux pieds, et Antommarchi deux vésicatoires, un sur la poitrine, le second au mollet. L’Empereur a poussé quelques soupirs. Plusieurs fois le docteur est allé chercher le pouls au col. 





Dr Archibald Arnott (1772-1855)


A deux heures et demie, le docteur Arnott a fait placer une bouteille remplie d’eau bouillante sur  l’estomac.




Jean-Abram Noverraz (1790-1849)


A cinq heures quarante neuf minutes, l’Empereur a rendu son dernier soupir. Les trois dernières minutes, il a rendu trois soupirs…

Au moment de la crise, léger mouvement dans les prunelles ; mouvement régulier de la bouche et du menton au front ; même régularité que dans une pendule. La nuit, l'Empereur avait prononcé le nom de son fils avant celui de : à la tête de l'armée. La veille, il avait demandé deux fois : "Comment s'appelle mon fils." Marchand avait répondu : "Napoléon." »

 






Louis, comte Marchand (1791-1876) 

Premier Valet de Chambre de l'Empereur


Tiré des “Cahiers de Sainte-Hélène” par le général-comte Bertrand, Grand Maréchal du Palais. 




Autour du lit mortuaire 


Au moment de la mort de Napoléon, parmi les seize personnes présentes, étaient le Maréchal du Palais et la comtesse Bertrand, leurs enfants Napoléon, Hortense, Henri et Arthur Bertrand, âgés respectivement  de 12, 11, 10 et 4 ans, le général-marquis de Montholon, les docteurs Antommarchi et Arnott, Louis-Joseph Marchand, Premier valet de Chambre de l’Empereur, comte de l’Empire, Jean-Abram Noverraz, valet, courrier et confident de l’Empereur, Louis-Etienne Saint-Denis le “Mamelouk Ali”, les abbés Vignoli et Buonavita. Certains d’entre eux étaient à Sainte-Hélène depuis le 15 octobre 1815.

La comtesse Bertrand arrêta la pendule. L’Empereur n’était plus mais Napoléon entrait dans la légende. 



Le transfert du cercueil de la Belle-Poule au transporteur La Normandie 

le 6 décembre 1840

 



L'arrivée aux Invalides le 15 décembre 1840 

devant une foule de plus d’un million de personne


Ciel glacé ! soleil pur ! Oh ! brille dans l’histoire !

Du funèbre triomphe, impérial flambeau !

Que le peuple à jamais te garde en sa mémoire

Jour beau comme la gloire,

Froid comme le tombeau

Victor Hugo

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